L’hypnose face aux traumas complexes et à la somatisation

Dorothée Simon

5/16/20254 min read

Des douleurs chroniques, une fatigue persistante, des tensions corporelles qui ne cèdent à aucun traitement… Et si ces symptômes étaient les traces silencieuses d’un passé traumatique oublié ou minimisé ? Dans le cas de traumatisme complexe ou stress post-traumatique complexe (C-PTSD), l’hypnose ouvre une voie unique de réconciliation entre le corps, l’émotion et la mémoire.

Le trauma complexe, un fardeau invisible

Le trouble de stress post-traumatique complexe, ou C-PTSD (Complex Post-Traumatic Stress Disorder), est encore largement méconnu en France, bien qu’il ait été reconnu par l’Organisation mondiale de la santé dans la classification internationale des maladies (CIM-11) depuis 2019.

Contrairement au stress post-traumatique classique, souvent lié à un événement ponctuel (accident, agression, catastrophe), le trauma complexe découle d’expositions répétées ou prolongées à des situations de stress extrême, généralement dans un contexte relationnel : violences psychologiques, négligence affective, insécurité chronique dans l’enfance, relations abusives.

Ce type de traumatisme affecte profondément la construction identitaire, l’estime de soi, la perception du monde et la régulation émotionnelle. Il agit en profondeur, souvent sans souvenir clair, car il peut s’enraciner avant même que la mémoire consciente soit pleinement développée.

Les symptômes caractéristiques incluent :

  • des troubles dissociatifs (sentiment d’être déconnecté de soi ou de la réalité)

  • une anxiété diffuse, parfois constante

  • une fatigue chronique et des douleurs corporelles persistantes

  • un sentiment de honte ou de culpabilité omniprésent

  • des difficultés relationnelles marquées

La somatisation, ou quand le corps garde la mémoire du traumatisme

Selon le Dr Bessel van der Kolk, psychiatre et chercheur en neurosciences, auteur de l’ouvrage Le corps n’oublie rien, le traumatisme ne se limite pas à un souvenir mental. Lorsqu’il n’a pas pu être exprimé, reconnu ou traité, il s’imprime dans le système nerveux, dans les tissus, et même dans la posture.

« Le traumatisme n’est pas l’événement lui-même, mais l’empreinte qu’il laisse dans le système nerveux », Bessel van der Kolk

De nombreuses personnes souffrant de C-PTSD consultent pour des symptômes physiques récurrents : douleurs dorsales, migraines, troubles intestinaux, oppression thoracique ou encore insomnies. La médecine conventionnelle ne trouve pas toujours d’explication claire, ce qui ajoute à la détresse du patient, qui peut se sentir incompris ou invalidé.

Ces manifestations sont ce que l’on appelle des somatisations. Le corps exprime une souffrance émotionnelle que l’esprit ne peut ou ne veut plus porter.

L’hypnose, une voie d’accès à la mémoire implicite

L’hypnose thérapeutique offre une réponse particulièrement adaptée aux personnes vivant avec un traumatisme complexe. Elle permet de travailler au niveau de la mémoire implicite, (non verbale, émotionnelle et corporelle), sans nécessairement revivre l’événement traumatique de manière brutale.

Lorsque la personne est en état d’hypnose, son activité cérébrale change. Les études d’imagerie montrent :

  • une réduction de l’activité du réseau par défaut, souvent associé aux ruminations et à l’auto-critique,

  • une meilleure communication entre les régions émotionnelles (système limbique) et rationnelles (cortex préfrontal),

  • une activation du système parasympathique, garant d’un état de sécurité et de calme physiologique.

Ce contexte favorise un travail thérapeutique profond, tout en respectant les défenses mises en place pour se protéger. Il est alors possible :

  • d’explorer les sensations corporelles comme des portes d’accès à des mémoires émotionnelles,

  • de symboliser l’expérience à travers des métaphores protectrices,

  • d’entrer en dialogue avec des « parties » dissociées de soi, souvent restées figées dans le temps traumatique.

Une approche encore peu développée en France

En France, l’hypnose est souvent réduite à un rôle de relaxation, ou utilisée pour des objectifs précis (sevrage tabagique, phobies, préparation à l’accouchement). Son application dans le cadre du trauma complexe reste marginale, bien qu’elle soit couramment intégrée à des protocoles spécialisés dans les pays anglo-saxons.

Des figures comme Peter Levine (Somatic Experiencing), Stephen Porges (théorie polyvagale) ou Janina Fisher (thérapie des parties) montrent à quel point l’approche corporelle et sensorielle est essentielle pour permettre une véritable intégration du trauma.

À Reims, je propose une approche spécifique de l’hypnose centrée sur le trauma, la mémoire corporelle et la restauration progressive de la sécurité intérieure. Elle repose sur une écoute fine du corps et du rythme de la personne, dans un cadre sécurisant et bienveillant.

Nouvelles perspectives cliniques : l'hypnose validée dans le traitement du C-PTSD

Des études récentes renforcent la reconnaissance du trouble de stress post-traumatique complexe (C-PTSD) et soulignent l'efficacité de l'hypnose dans sa prise en charge. Une recherche doctorale menée par Marion Fareng a évalué l'impact de l'hypnose sur 77 patients souffrant de traumatismes complexes. Les résultats ont montré une disparition du syndrome de répétition traumatique et une atténuation significative des symptômes associés, tels que la dissociation et les douleurs psychosomatiques.

Par ailleurs, une étude publiée en 2023 dans L'Information psychiatrique a approfondi les critères diagnostiques du C-PTSD dans la CIM-11, mettant en évidence les altérations profondes du fonctionnement affectif et relationnel chez les patients. Cette reconnaissance officielle facilite l'identification et le traitement des symptômes complexes, souvent confondus avec d'autres troubles psychiques.

Ces avancées scientifiques confirment l'importance d'une approche thérapeutique intégrative, où l'hypnose joue un rôle central en permettant un travail en profondeur sur les mémoires implicites et les manifestations somatiques du trauma.

Écouter le corps, c’est commencer à guérir

Les personnes souffrant de symptômes chroniques inexpliqués ou de mal-être diffus ne sont pas «trop sensibles» ni «faibles». Souvent, leur corps parle une langue ancienne, celle du traumatisme non traité.

L’hypnose permet d’établir un dialogue respectueux avec cette mémoire somatique, d’en alléger progressivement le poids, et de retrouver un sentiment d’unité intérieure.

Si vous vous reconnaissez dans ces mots, ou si vous souhaitez explorer ce que votre corps tente de dire, je vous accueille à mon cabinet à Reims pour un premier échange, sans engagement, dans un cadre confidentiel et professionnel.

Références :

  • Van der Kolk, B. (2014). The Body Keeps the Score. Viking Press.

  • OMS (2019). Classification Internationale des Maladies , CIM-11.

  • Institut Français d'Hypnose

  • Cairn.info